Arrimages, épisode 6 : La protection de l’eau et de nos bassins versants

(Enregistré à l’été 2022). Le sixième objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est « Eau propre et assainissement ».  À première vue, on peut se dire que cette thématique n’a rien à voir avec le développement social, que ça concerne purement l’environnement. Or, le développement durable, c’est l’intersection de différents types de développement. À travers cette entrevue avec Chloé Lacasse, chargée de projet Actions lacs au Groupe de concertation des bassins versants de la zone Bécancour (GROBEC), Audrey, notre agente de communication en apprendre plus sur :

  • Le rôle et le mandat des organismes de bassins versants ;
  • La qualité de l’eau du bassin versant de la zone Bécancour ;
  • Les acteurs qui sont concernés par les enjeux touchant l’eau ;
  • Le caractère collectif de l’eau ;
  • La place de la participation citoyenne dans les organisations comme GROBEC ;
  • Les conséquences potentielles de ne pas se préoccuper de l’eau ;
  • Une initiative inspirante auprès de jeunes de la Polyvalente La Samare à Plessisville.

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Notes d’épisode

Pour suivre GROBEC

Transcription

Arrimages s’inspire des grandes lignes du Programme de développement durable à l’horizon 2030 pour présenter des actions et des initiatives qui se déroulent au Centre-du-Québec. Le sixième objectif du programme est « Eau propre et assainissement ». Au Québec, il existe des organismes de bassins versants qui assurent la gestion intégrée de l’eau. Un de ces organismes est le Groupe de concertation des bassins versants de la zone Bécancour. À première vue, on peut penser que les enjeux concernant l’eau sont purement de nature environnementale. Or, le développement durable, c’est l’intersection de différents types de développement. Dans cet épisode, entre autres, nous en apprendrons plus sur la place de l’intersectorialité et de la participation citoyenne dans la gestion de l’eau, mais aussi l’importance de s’en préoccuper d’un point de vue social.

[DÉBUT THÈME MUSICAL]

Bienvenue à Arrimages, la baladodiffusion du Comité régional en développement social du Centre-du-Québec. Mon nom est Audrey Michel et, à chaque épisode, je vais à la rencontre des gens et des organisations qui s’impliquent pour améliorer la qualité de vie de nos communautés.

Ensemble, explorons les dessous du développement social et son interconnexion avec le développement durable. De la concertation à l’action, découvrons ce qui se fait ici, au Centre-du-Québec.

[FIN DU THÈME MUSICAL]

Audrey Michel : Donc, aujourd’hui, j’ai le plaisir de recevoir Chloé Lacasse, qui est chargée de projet Actions lacs au Groupe de concertation des bassins versants de la zone Bécancour, ou plus communément appelé GROBEC de son acronyme. C’est un organisme qui est situé à Plessisville et qui couvre une partie du territoire de Chaudière-Appalaches et du Centre-du-Québec. On va aller dans les détails de ça sous peu, mais pour commencer, je tiens à te remercier : merci, Chloé, d’être là.

Chloé Lacasse : Merci de me recevoir.

Audrey Michel : Ça me fait plaisir. Alors, pour débuter, est-ce que tu pourrais nous expliquer c’est quoi GROBEC et c’est quoi vos principaux mandats ?

Chloé Lacasse : Oui. Donc, pour commencer, GROBEC, c’est un organisme de bassins versants. Donc, on est l’organisme de bassins versants de la zone Bécancour. Je pense que c’est important de préciser tout de suite c’est quoi un bassin versant pour bien comprendre, là, c’est quoi notre organisme. Donc un bassin versant, pour ceux pour qui c’est peut-être pas très clair, c’est un territoire où toute l’eau qui va tomber sur le territoire va s’écouler au même point. Donc, quand on parle du bassin versant de la rivière Bécancour, c’est que toutes les gouttes d’eau qui vont tomber sur ce territoire-là vont finir par atteindre la rivière Bécancour. Puis, les bassins versants sont délimités de façon naturelle. Donc, c’est pas des limites administratives, là, comme les MRC ou les régions administratives. Donc, c’est pourquoi notre bassin versant touche plusieurs régions, dont le Centre-du-Québec et Chaudière-Appalaches, par exemple. C’est vraiment délimité par, souvent, les crêtes des montagnes qu’on appelle des lignes de partage des eaux où si une goutte d’eau tombe plus à l’est ou plus à l’ouest, ça va décider finalement dans quel bassin versant elle va s’écouler. Donc, maintenant que le bassin versant c’est plus clair, nous, on est un organisme de bassins versants. Donc, c’est un organisme à but non lucratif qui vise à assurer la gestion intégrée de l’eau par bassin versant. On a été fondé en 2003. Puis, c’était vraiment centré sur le bassin versant de la rivière Bécancour à ce moment-là. Et puis, depuis 2009, on s’est fait ajouter, là, d’autres bassins versants qui étaient orphelins. Donc, c’est des bassins versants qui étaient vraiment secteur fleuve. Donc, des bassins versants où la rivière s’écoule directement dans le fleuve et qui étaient de petite taille. Donc, ça ne valait pas d’avoir un organisme seulement pour ce bassin-là. Donc, c’est ça. Ils ont été jumelés à nous là en 2009. Donc, depuis, on est vraiment la « zone Bécancour ». Puis, les missions des OPV, c’est vraiment d’être une table de concertation. Donc, c’est d’asseoir plein de beaux mondes ensemble, qui sont des acteurs sur le territoire. Parce que, comme je disais tantôt, un bassin versant, c’est vraiment un territoire où toute l’eau qui s’écoule va à la même place. Ça veut dire que toutes les personnes qui sont dans ce territoire-là, bien, ils ont une influence sur l’eau. Que ce soit un citoyen dans la ville, un riverain, un producteur agricole, un producteur forestier, les municipalités, les MRC, tout le monde a de l’influence. Donc, c’est comme d’asseoir tout le monde ensemble ; puis de pouvoir discuter des enjeux de l’eau ; puis comment gérer ces enjeux-là ; puis quelles sont les bonnes méthodes ; puis d’en discuter ensemble. Donc, c’est vraiment comme le mandat de base de l’organisme.

Audrey Michel : Génial, tu l’as mentionné, vous, le principal bassin versant, c’est celui de la rivière Bécancour. Puis, tu mentionnais que depuis 2009, il y en a des orphelins qui se sont joints, puis que vous administrez maintenant, là, comme la « zone de la rivière Bécancour ». Est-ce que tu pourrais nous nommer, peut-être, quelques-uns de ces plus petits bassins versants là qui font maintenant partie du territoire que vous couvrez ?

Chloé Lacasse : Oui, il y a, notamment, la rivière Glaise, la rivière aux Orignaux — donc, les bassins versants de ces rivières-là — la rivière Marguerite, il y a la petite rivière du Chêne. Donc, c’est vraiment plein de petits bassins.

Audrey Michel : Super. Puis, bien là, tu l’as mentionné, le plus grand en importance dans ces bassins versants là, c’est celui de la rivière Bécancour. Est-ce que tu pourrais nous parler un peu de c’est quoi son état de santé au bassin versant de la rivière Bécancour ?

Chloé Lacasse : Oui. Dans le fond, quand je vais parler de l’état de santé, ça va être principalement de la rivière Bécancour, puis les cours d’eau qui s’y jettent aussi. Mais c’est principalement la rivière Bécancour où on a le plus de données, si on peut dire, pour vraiment évaluer son état de santé. Pour ceux qui connaissent bien le territoire, peut-être pour expliquer aussi là, dans le fond là, la rivière Bécancour commence avec un lac de tête qui est le lac Bécancour à Thetford. Puis, elle s’écoule, là, jusqu’au fleuve à Bécancour (dans la municipalité de Bécancour). Puis, c’est là qu’elle va aller rejoindre le fleuve. Dans le passé, la rivière Bécancour était vraiment avec une mauvaise réputation, donc, de très mauvaise qualité. Puis même, c’est en 1985, je pense, qu’il y a eu un premier rapport qui est sorti du ministère qui disait que c’était une tâche urgente d’agir pour la Bécancour. Donc, ça fait longtemps, là, qu’elle a eu cette réputation-là. Mais c’est important de dire que, bon, ça s’est amélioré premièrement. Mais aussi, on peut pas parler de la qualité de l’eau de la rivière Bécancour en entier. C’est pas pareil partout. Exemple : historiquement, c’était vraiment pollué partout parce que la majorité des villes, dans le passé, bien, laisser leurs eaux usées aller directement dans les cours d’eau. Ça, c’est une pratique qui se fait de moins en moins, pratiquement plus. Il y en a encore un petit peu, mais ça s’améliore. Donc ça, ça a eu un bel impact partout, dans toute la rivière. Mais actuellement, il y a encore des problématiques de qualité de l’eau, principalement dans le secteur amont. Quand on parle de l’amont, c’est vraiment le haut de la rivière. Donc, on peut parler de la haute Bécancour également, qui est en fait la ville de Thetford jusqu’à Irlande, à peu près, ou le lac William aussi, à Saint-Ferdinand. Donc, ce secteur-là est quand même assez problématique. C’est une très mauvaise qualité de l’eau quand on regarde les résultats. Puis, ça, c’est depuis 1998, mais même avant ; tu sais, comme je disais, le rapport datait de 1985, mais les données pour la qualité de l’eau, précisément, c’est depuis 1998. Puis, ça l’a pas nécessairement été très… ça n’a pas vraiment amélioré dans le secteur-là, pour diverses raisons. La ville de Thetford travaille fort là-dessus en ce moment. Ils rajoutent une usine de désinfection, d’ailleurs, dans les prochaines années à venir, qui, ça, va permettre de traiter les coliformes fécaux qui sont en fait vraiment problématiques dans le secteur. Donc, ça devrait vraiment s’améliorer, mais pour l’instant, ce secteur-là est assez problématique aussi avec les haldes minières de la région de Thetford. Ils sont vraiment collés sur la rivière. Quand il y a des bonnes pluies, bien ça l’amène ces sédiments-là, puis même les fibres d’amiante, dans la rivière. Donc, c’est sûr que ce secteur-là a plus de problèmes. Puis, quand on arrive aux lacs fluviaux… donc, des lacs fluviaux, c’est vraiment des lacs ou la rivière va s’élargir. Donc, on parle ici du lac à la Truite d’Irlande du lac William et du lac Joseph. Malheureusement pour ces lacs-là, mais bénéfiquement pour la rivière, ça va faire un espèce de filtre. Ça va permettre aux sédiments de se décanter dans ces lacs-là. Donc, quand l’eau ressort, dès la sortie du lac William, la qualité de l’eau est déjà meilleure. Même le lac William, la qualité de l’eau est satisfaisante. Puis, après le lac Joseph jusqu’au fleuve, la qualité de l’eau est satisfaisante. Donc, elle n’est pas nécessairement très bonne, mais c’est une bonne qualité en général. Donc, on n’a pas trop d’inquiétudes pour ce secteur-là. Donc, c’est ça. C’est comme vraiment divisé en 2 quand on parle de l’état de santé parce que, c’est ça, il y a un secteur que ça va moins bien ; ensuite, on a les lacs qui viennent comme jouer un rôle vraiment important ; puis, après, la rivière va mieux, si on peut dire.

Audrey Michel : Super. Merci beaucoup pour cet état de situation qui divise bien, je pense, là, on voit. Puis, je trouve ça intéressant de voir qu’en amont, bien là, on a une qualité d’eau qui est pas géniale, mais que ça veut pas dire que tout le bassin versant va avoir une mauvaise qualité d’eau. Puis, ce que j’entends aussi, c’est que tu me disais qu’en 1985 — si je me trompe pas d’année — que c’était l’entièreté du bassin versant qui était d’une qualité insatisfaite. Alors que là, on a une amélioration quand même.

Chloé Lacasse : Oui, c’est ça. Dans le rapport ça parle vraiment « la Bécancour, une tâche urgente ». Ça séparait pas vraiment les secteurs. Donc oui, on a une amélioration, c’est sûr. Donc, il y a toujours du positif qu’on peut aller chercher en améliorant nos pratiques finalement.

Audrey Michel : Puis là, tu mentionnais que, par exemple, une des pratiques qui se faisaient plus c’était de déverser les eaux usées directement. Est-ce qu’il y a d’autres… est-ce qu’on est capable d’identifier d’autres actions qui ont pu, peut-être, contribuer à cette amélioration-là, en partie, de la qualité de l’eau ?

Chloé Lacasse : Bien c’est sûr que je pense, qu’avec le temps aussi, la sensibilisation des gens qui a embarqué dans tout ça. À l’époque, c’est pas seulement les eaux usées qui étaient déversées dans les cours d’eau. C’était pratiquement les poubelles, les dépotoirs. C’était tout. Tout allait dans les cours d’eau. Donc, une mentalité qui a changé avec le temps. Les gens ont voulu faire plus attention. Puis, de plus en plus que le temps passe, les gens vont vouloir avoir des bandes riveraines avec beaucoup de végétation sur le bord de l’eau, que ce soit pour avoir une tranquillité ou que pour protéger l’environnement. Donc, je pense que ça a joué, la sensibilisation des gens, l’éducation. Mais des mesures concrètes, je pense vraiment que c’est les eaux usées qui ont faites la plus grosse différence en termes de qualité de l’eau.

Audrey Michel : Génial. Merci pour les précisions. On l’a nommé : on a l’amont où est-ce qu’on a une qualité d’eau insatisfaisante, puis, là, on tombe dans les lacs et ça s’améliore. Je l’ai dit en début d’entrevue, tu es chargée de projet du projet Actions lacs. Est-ce que tu pourrais nous parler de ce projet-là ?

Chloé Lacasse : Oui. En fait, Actions lacs, premièrement, ça a été comme créé dernièrement. C’est un programme qui existe depuis longtemps, mais, vraiment, le poste de chargée de projet Actions lacs est créé depuis mon arrivée. Donc, depuis à peu près un an et demi. Ça vise vraiment à avoir, à offrir un soutien à l’année aux associations riveraines et aux municipalités dans lesquelles il y a des lacs en fait. Puis, de les accompagner — bon, c’est ça — pour le développement de projets, pour transmettre des informations. Donc, dès qu’on a des nouvelles informations, moi je fais le contact. Puis, on assure aussi d’avoir un… ça permet d’avoir un pont direct, donc, quand les gens veulent communiquer avec GROBEC. C’est facile, maintenant ils me connaissent, d’établir un lien de confiance avec les associations riveraines. De les mettre en valeur aussi, les associations riveraines. C’est des riverains. C’est des citoyens qui sont pas nécessairement tous riverains, là non plus, qui participent. Donc c’est vraiment des gens qui ont à cœur la santé du lac, puis qui veulent faire des actions concrètes. Donc, nous, on veut vraiment avoir quelqu’un (qui est mon poste à moi en fait) qui les appuie là-dedans. Puis, montrer qu’on les laisse pas tomber. Puis, de là, découle également un programme qui est le programme Actions lacs, également, qui est un programme de soutien financement — si on peut dire — pour les associations riveraines dans la réalisation de leurs projets. Donc, c’est vraiment des projets qui visent à améliorer la qualité de l’eau de leurs lacs, que ce soit par la sensibilisation ou vraiment des suivis de qualité de l’eau ou des caractérisations. Donc, ce programme-là, en fait, ça équivaut à 2 jours de travail d’un technicien qu’on offre gratuitement aux associations riveraines. Donc, parfois, ça permet de faire un projet en entier si c’est un petit projet, des petits suivis de qualité de l’eau, des choses comme ça, des projets de sensibilisation aussi. Puis, si c’est des plus gros projets comme, je sais pas… une caractérisation complète d’un milieu humide ou caractériser les herbiers aquatiques, faire des suivis d’espèces exotiques envahissantes. Bon, il y a plein d’exemples, mais si c’est des projets qui nécessitent plus que 2 jours de travail, bien, on fait une déduction sur les offres de services que nous on fournit à l’association. Donc, ça leur donne un espèce de rabais, finalement, pour faire ces projets-là. Donc, c’est vraiment pour les aider, pour qu’il y ait des projets qui se mettent en branle. Puis, leur montrer que, bon, on est avec eux. On est un organisme à but non lucratif, donc on n’a pas beaucoup de financement nécessairement pour faire des projets avec chacun des lacs, mais ça, ça permet de les aider comme on peut. Puis de leur montrer : « Bon, lâchez pas. Une petite tape dans le dos. On est là, puis on veut vous aider. »

Audrey Michel : Super. Puis là, pardonne mon ignorance, est-ce que tu pourrais m’expliquer un peu plus en détail c’est quoi une caractérisation ?

Chloé Lacasse : Oui. Bien en fait, ça va dépendre de qu’est-ce qu’on caractérise. Exemple : quand je parle des caractérisations des herbiers aquatiques, c’est vraiment, on va se déplacer sur le lac en canot, on va identifier les espèces aquatiques, donc les plantes aquatiques qui sont présentes. C’est quelles qui sont dominantes ? C’est quelles qui le sont moins ? C’est à quel endroit ils se retrouvent ? Donc, vraiment le délimiter aussi sur une carte. Et puis, ensuite, bon, ça permet d’avoir un rapport de vraiment c’est quoi les espèces qui sont présentes. Souvent les caractérisations d’herbiers aquatiques, elles sont faites principalement pour faire des suivis des espèces exotiques envahissantes. Là, il y a une espèce qui est très connue, ceux qui ont des lacs proches doivent le savoir, mais qui est la myriophylle à épis qui est une espèce exotique envahissante et qui est de plus en plus présente dans nos lacs. Donc, souvent, faire ces caractérisations-là qui sont vraiment complètes, qui viennent vraiment identifier — on fait plusieurs stations sur le lac qu’on identifie tout ce qu’on voit, donc c’est vraiment très très précis — ça permet de voir l’évolution. Donc, si on retourne d’une année à l’autre, ça permet de voir l’évolution. On fait notamment la caractérisation des herbiers du lac Rose à chaque année, depuis plusieurs années. Là, cette année, on y va pas puisque, bon, c’est resté stable depuis quelques années, mais c’est un exemple de ce qu’on peut faire.

Audrey Michel : Super. Merci beaucoup pour la précision. Puis ça m’aide à, justement, à mieux comprendre que c’est pas qu’on prend une photo dans le temps, mais c’est qu’on va venir prendre d’autres photos plus tard pour pouvoir comparer. Dire « bon bien, il y a eu une évolution », ou « notre lac est stable », ou au contraire « il s’améliore », ou au contraire « il se dégrade ».

Chloé Lacasse : Ouais.

Audrey Michel : Super. T’en as parlé un petit peu ici, t’en as parlé aussi un peu en présentant GROBEC, mais tu l’as dit : vous êtes un groupe de concertation. Tu l’as mentionné, c’est tout le monde qui a une influence sur les cours d’eau, sur la qualité des cours d’eau. On a parlé notamment des municipalités. On a parlé de la sensibilisation, de l’éducation, qui se fait auprès des citoyens. Est-ce que tu pourrais nous parler un peu d’avec qui vous travaillez chez GROBEC ? C’est qui les acteurs qui sont concernés ?

Chloé Lacasse : Ouais ! C’est vraiment vague, le plus de gens possible si je pourrais dire. Mais, vraiment, à nos concertations, la plupart du temps, on va avoir : des citoyens, des riverains, des membres des associations riveraines, des producteurs agricoles, des producteurs forestiers. Les gens des cannebergières aussi vont être présents. On a aussi les personnes des municipalités, des MRC. On peut aller avec l’UPA, l’Union des producteurs agricoles, ils sont souvent avec nous, dans nos concertations, également sur notre CA. Aussi, le syndicat des producteurs forestiers. Donc, vraiment, ça touche pratiquement tout le monde. On va vraiment chercher un peu de tout le monde. On veut avoir, bon, l’opinion de tout le monde. Mais aussi, de concerter tout ce beau monde-là, ça nous permet… Exemple : on veut faire une action en territoire forestier. Donc, nous, on sait qu’il y a une problématique. On a une idée pour améliorer cette problématique-là, mais parfois c’est les méthodes pour aller rejoindre les producteurs forestiers que nous on a moins, ou la manière de parler — il y a des termes qu’on connaît pas, on n’est pas des ingénieurs forestiers — donc, de parler avec des producteurs forestiers qui font ça depuis toujours, ou avec le syndicat des producteurs forestiers, eux peuvent nous aider à dire : « Bien, la meilleure méthode pour nous rejoindre, c’est par tel canal ou c’est par telle activité. » Ou si on fait cette action-là, ça va peut-être leur nuire, donc faudrait peut-être penser un peu à d’autres choses. Donc, vraiment, ça vient de nous aider finalement à mettre en œuvre des actions qui sont réalistes pour les producteurs. Parce que si, nous, on vient proposer des actions qui vont nuire aux producteurs agricoles ou aux producteurs forestiers, bien ils vont pas les faire. Il faut que ce soit quelque chose qui les aide d’un côté, qui a des bénéfices pour eux comme pour nous, puis qu’on arrive à le faire ensemble. Donc c’est ça. C’est pour ça qu’on se met tous ensemble.

Audrey Michel : Génial. Puis, tu l’as mentionné en faisant ton énumération, tu l’as mentionné aussi en parlant du projet Actions lacs, que les citoyens semblent quand même s’impliquer beaucoup auprès de GROBEC. Est-ce que tu pourrais, justement, nous parler un peu de la place que prend la participation citoyenne dans vos activités ? Puis, ça peut être, par exemple, les associations de lacs. Tu mentionnais que c’est beaucoup, justement, des citoyens qui s’impliquent dans ces associations-là. Est-ce que tu pourrais élaborer un peu là-dessus, s’il te plaît ?

Chloé Lacasse : Bien oui, bien oui. Les citoyens, bien c’est ça : principalement, on a beaucoup de contacts par les associations riveraines parce que c’est un canal qui est facile. Dans le sens que ces gens-là, ils se regroupent déjà plusieurs citoyens ensemble, pour parler des problématiques, puis ensuite, ils peuvent nous inviter à des rencontres. On a des contacts déjà avec ces gens-là. Donc ça, souvent, c’est des riverains. Mais parfois, ça peut être des citoyens qui habitent dans le village juste à côté, mais eux aussi profitent du lac. Donc pour eux, c’est super important est de faire des actions. Donc, eux peuvent faire plusieurs actions, même parfois il y a des associations qui sont sonneurs d’alarme. Je pense notamment à l’association protection du lac à la Truite. Ils sont très de l’avant-garde. Ils vont beaucoup faire sonner des alarmes, parler au ministère, vraiment être très dans l’action. Il y a l’association du lac de l’Est, aussi, qui font plusieurs projets, qui portent les projets, qui sont fiers. Puis, avec les associations, ça nous permet de rejoindre les citoyens qui sont pas non plus dans les associations, puisqu’ils vont souvent organiser des journées d’informations ou des webinaires dans lesquels on va participer pour parler des projets que les associations ont mis en œuvre, mais c’est nous qui a réalisé finalement. Donc ça, ça arrive souvent. Notamment, on en a 2 cet été déjà, des journées où on va présenter nos projets aux citoyens qui habitent sur le bord de ces lacs-là. Puis sinon, les citoyens en général, ils sont très importants pour toutes nos activités. On a fait notamment dernièrement (la semaine passée, en fin de semaine), la corvée de nettoyage des déchets autour des lacs à la truite d’Irlande, lac William, lac Joseph. Donc, c’est des citoyens qui habitent autant dans le village que sur le bord de la rivière que sur le bord des lacs qui viennent, qui participent, qui ramassent les déchets avec nous, qui sont sensibilisés à l’environnement, puis qui disent : « Bon, on veut participer. » Quand on fait un tournoi de pêche à chaque hiver à Saint Ferdinand pour sensibiliser les jeunes — c’est un tournoi de pêche pour les jeunes de 12 ans et moins, euh, 18 ans et moins, excusez-moi — il y a toujours beaucoup, beaucoup de bénévoles citoyens qui viennent. Donc, on veut vraiment faire un lien avec les citoyens. Que ce soit, bon, pour avoir des actions, pour qu’ils nous parlent de ce qu’ils veulent pas, qu’est-ce qu’ils veulent, qu’est-ce qui est important pour eux, qu’est-ce qui l’est moins, qu’est-ce qu’ils sont prêts à faire ou pas. Mais aussi pour des activités, on a besoin qu’ils s’impliquent avec nous, on a besoin de leur aide pour tout. Comme je disais, tout le monde a un impact. Donc, si on est capable de les joindre, de leur en parler, bien, pour nous, ça fait une grosse différence. Puis de voir qu’ils veulent participer avec nous dans nos activités, que ça montre que, finalement, ils apprécient notre collaboration.

Audrey Michel : C’est génial. Puis, quand je t’entends parler comme ça, ça me donne un peu l’image que les citoyens, en quelque sorte, c’est un peu vos yeux et vos oreilles sur le terrain. Quand tu parles qu’il y en a qui vont sonner des cloches d’alarme, de dire que : « Oups, on y a peut-être quelque chose qui se passe avec notre lac. Là, il faudrait aller investiguer ça. » C’est un peu l’image que ça me donne. Est-ce que je suis dans le champ ?

Chloé Lacasse : Non, c’est vraiment ça, c’est absolument ça. Il y a pas de meilleure façon de le dire. Je pense que les citoyens c’est nos yeux et nos oreilles, parce que nous, on se déplace, on est toujours sur le terrain l’été, à tous les jours sur le territoire, mais notre territoire est assez grand. Donc, il y a des endroits où on va pas nécessairement à toutes les semaines, même à tous les mois, ça dépend. Donc, c’est ça, à chaque année on se fait appeler. L’année dernière, c’était au lac à la Truite d’Irlande. Justement, bon, il y avait un épisode d’algues filamenteuses qu’on n’aurait pas vu parce que ça a pas duré si longtemps. Puis on n’est pas allé dans cette période-là, mais on s’était appelé, on a été voir. On a pu ensuite avoir des rencontres avec les ministères, puis en discuter. Sinon il y a eu également… bon. Parfois il y a des gens qui [inaudible]. Il y a eu quelqu’un qui a remblayé sur le bord de la rivière, c’est pas permis. Bon, bien là, il nous appelle pour en parler : est-ce qu’il avait le droit ou pas, pouvez-vous aller voir ? Donc, c’est vraiment… c’est vraiment ça : nos yeux et nos oreilles qui nous permettent de suivre encore plus la qualité de l’eau sur le territoire, que ce soit dans la rivière Bécancour ou toutes les autres rivières qui s’y jettent dedans. Donc oui, vraiment.

Audrey Michel : Bon bien, je suis contente de voir que j’avais bien saisi.

Chloé Lacasse : Ouais !

Audrey Michel : Ça veut dire que j’étais dans la bonne… dans la bonne lancée ! Puis, justement, t’as parlé de tous les acteurs qui sont impliqués autour des cours d’eau, qu’on a tous une influence. Tu parles des citoyens, des riverains, qui bénéficient du lac, qui vont utiliser les lacs. Est-ce que tu pourrais, justement, nous parler un peu de ce qu’on appelle le caractère collectif de l’eau ?

Chloé Lacasse : Bien oui. Puis ça, parfois, présentement, ça tombe un peu — j’ai l’impression — ça peut tomber dans l’oubli. Parce qu’il y a beaucoup de gens qui se privatisent, mais c’est ça, faut pas oublier que l’eau, c’est collectif. Ça appartient à tout le monde. Les plans d’eau, les rivières, c’est important d’avoir des accès pour tout le monde. Tout le monde a le droit d’en profiter. C’est pas pour rien, justement, que les plans d’eau sont de juridiction fédérale, c’est que ça appartient à tout le monde au Canada. Puis même des citoyens en vacances, ils peuvent venir profiter des lacs. C’est important de se le rappeler. Il y a un phénomène qui se passe en ce moment, qui est, comme je le disais, la privatisation des lacs. Qui est de… voyons, je perds le mot… de mettre des accès, en tout cas, pour empêcher les gens de descendre gratuitement au cours d’eau. Puis, il y a des raisons pour ça. Les municipalités qui font ça, c’est pas pour être méchant, puis pour empêcher les gens d’y aller. C’est parce qu’ils ont, bon, des inquiétudes par rapport à l’utilisation du lac. Il y a trop de bateaux sur les lacs ou il y a, bon, plein de raisons pour mettre des barrières d’accès. Mais c’est ça, ça peut causer des problèmes d’accès collectifs à l’eau parce qu’il faut… c’est ça, c’est une ressource qui appartient à tout le monde et il faut que les gens qui veulent aller en profiter puissent le faire. Donc, faut au moins avoir des accès pour que les gens puissent aller se baigner dans les lacs, il faut avoir des accès pour les rivières. Et puis, même si c’est arrivé là, je me suis promenée sur le territoire dernièrement, puis il y a des endroits sur les rivières, on voit des affiches « terrain privé » au milieu de la rivière avec une barrière. Mais faut pas se laisser faire peur par ça, parce que les rivières… tu sais, on peut se promener dans une rivière, là, ça appartient à tout le monde. C’est important de se le rappeler.

Audrey Michel : Merci du rappel. Sachez-le, l’eau appartient à tout le monde ! Puis, je pense que c’est quand même important parce que je veux dire l’eau, on pourrait pas survivre sans eau. Donc, si on pouvait pas avoir accès à cette eau-là comme collectivité, il y aurait, je pense, des questionnements sérieux à se faire. Mais bon, bref, je rentrerai pas là-dedans. Là, je voulais rentrer dans peut-être des scénarios hypothétiques. Je veux pas faire peur à personne, mais on le sait, la qualité de l’eau, c’est quelque chose qui est important. Souvent, quand on va penser à la qualité, on va penser à l’impact, vraiment sur, disons, les poissons ou la végétation à l’intérieur du lac. Mais on va pas penser nécessairement aux impacts que ça peut avoir pour nous. Et moi, étant donné que j’ai une lunette de développement social, on a parlé de participation citoyenne. C’est génial, mais je veux aussi qu’on pense à dire que l’environnement et notre qualité de vie en tant que citoyen d’une communauté, c’est interrelié. Fait que si on s’imaginait que des organisations comme GROBEC, ça n’existait pas, puis que personne ne se préoccupait de la santé de nos bassins versants, ça pourrait être quoi les conséquences potentielles ?

Chloé Lacasse : Ouais, c’est une bonne question, puis je dirais qu’il y en a plusieurs. Il y a plusieurs conséquences pourraient découler de ça. Sans dire que GROBEC fait tout là, c’est vraiment si tous les citoyens faisaient pas attention il y a plusieurs choses qui pourraient arriver. Donc, premièrement, pour justement ce qui est du caractère collectif de l’eau, de profiter des plans d’eau pour aller se baigner, pour aller se promener en canot, en kayak, en bateau, et bien, faut que le plan d’eau soit beau. Faut que le plan d’eau soit encore en santé pour plusieurs raisons. Parce qu’en fait, les lacs, c’est quand il y a une mauvaise qualité de l’eau, quand il y a beaucoup de nutriments… mettons, on fait pas attention, il n’y a pas de bande riveraine nulle part, personne fait attention, on met des engrais sur le bord de l’eau. Tout ça, ça finit — les sédiments, les engrais, les nutriments — ça finit par arriver dans le lac. Ça va favoriser la prolifération de plantes aquatiques. Le fait qu’il y ait plus de plantes aquatiques, ça va faire que quand eux vont mourir — quand l’eau va devenir très froide à la fin de la saison estivale, les plantes vont mourir — ça va faire beaucoup de matières organiques, ça va prendre plus d’oxygène. Donc, on voit la file qui s’en suit et ça, ça fait en sorte en fait que le lac va vieillir plus rapidement, qu’on appelle le phénomène d’eutrophisation qui est le vieillissement accéléré des lacs. Puis ça, ça fait que… parce que le vieillissement des lacs est naturel. On s’entend, tous les lacs vont vieillir, mais ce qui arrive, c’est que le vieillissement est accéléré. Puis, il l’est déjà en ce moment, mais si les gens faisaient pas attention du tout, ce serait encore pire. Puis, ce qui arrive en fait, c’est le lac, une fois qu’il est vraiment vieilli, va se transformer en milieu humide. Donc, ce sera plus un milieu qui va être accessible. Donc, ça, c’est sûr que c’est un scénario qui prend plusieurs années pour arriver à ça. Sinon, avec les changements climatiques aussi, le manque d’eau. Donc l’eau, comme on disait, c’est important pour survivre là. Boire de l’eau, se nourrir, tu sais, on a besoin de l’eau. Avec les changements climatiques notamment, on s’attend à une augmentation des périodes de chaleur extrême et des sécheresses pour le Centre-du-Québec. Donc, ça, on peut s’attendre que ça ait des impacts. Ça baisse le niveau de l’eau en général. Mais aussi, bon, il y a des changements climatiques, on n’a pas de contrôle — on peut contrôler un peu en essayant de nos impacts, mais on n’a pas de réel contrôle sur ce qui se passe avec la température — donc, nous, si les citoyens font pas attention, si les municipalités font pas attention, puis les producteurs, tout le monde, puis qu’on continue à autant évacuer l’eau. Donc ça, c’est une problématique qu’on a beaucoup là. On veut pas d’eau sur nos terrains. Donc, on a des gouttières qui vont aller directement dans notre entrée asphaltée qui va se rendre directement dans l’égout pluvial qui va se rendre directement dans le cours d’eau. On veut pas que l’eau reste. C’est une mentalité qui a été beaucoup ancrée dans la tête des gens. Autant dans les champs agricoles, il y a beaucoup de drainage. Les fossés de route aussi, ça crée, bon, des allées où le courant, puis l’eau va s’écouler encore plus rapidement. Puis, elle aura pas le temps de s’infiltrer. C’est très très important que l’eau s’infiltre dans le sol le plus près de l’endroit où elle tombe. Donc, si on pense à la pluie, une goutte d’eau qui tombe chez toi, sur ton terrain, devrait pouvoir s’infiltrer sur ton terrain pour plein de raisons. Premièrement, justement, pour la nappe phréatique, pour les niveaux d’eau, pour recharger cette nappe-là qui nous permet de s’approvisionner en eau potable. Et puis, ça, c’est pas quelque chose… tu sais, là, on parle d’alarmisme, puis dans le futur, mais ça, ça arrive déjà. Il y a des gens sur notre territoire, l’été dernier, en 2021, qui ont manqué d’eau dans leur puits durant l’été. Donc, c’est pas une hypothèse lointaine à laquelle on pense. C’est vraiment quelque chose qui arrive en ce moment. Donc, c’est vraiment super important, premièrement, d’économiser l’eau l’été aussi. Si on peut récupérer l’eau de pluie, puis arroser nos plantes avec ça, déjà là, c’est déjà une bonne différence. Donc, si les gens font pas attention, puis qu’on continue le drainage aussi important, que ce soit par les égouts pluviaux, les producteurs forestiers, les producteurs agricoles, quoi que ce soit, ça fait que l’eau ne s’infiltre pas. Puis, on a besoin que l’eau s’infiltre pour s’abreuver. Puis sinon, on peut aller avec d’autres impacts encore qui pourraient arriver, d’autres conséquences. Il y en a plein, comme je disais là. J’en ai quelques-unes en tête. La qualité de l’eau en général, ça peut aussi affecter des prises d’eau potable parce qu’il y a des prises d’eau potable qui sont pas de l’eau souterraine, qui vont être des plans d’eau. Donc, ça peut avoir un effet, c’est sûr. Donc, encore une fois, le ruissellement de l’eau. Donc l’eau qui est pas infiltrée dans le sol va ruisseler. Ça peut faire de l’érosion dans les fossés si elle arrive avec des gros coups d’eau super importants, ça va éroder les fossés, amener les sédiments, bon, bla-bla, ce que je dis depuis tantôt finalement. Mais ça nuit à la qualité de l’eau, ce qui peut finalement nuire à notre approvisionnement en eau également. Puis, il y a aussi la vie aquatique en général. Un lac qui est en super bonne santé, qui est super bien oxygéné, il va avoir des espèces qui sont plaisantes pour la pêche sportive, une activité qui est très pratiquée par des citoyens un peu partout. C’est très populaire la pêche. Et les gens aiment ça pêcher de la bonne truite. Bien ça, c’est une espèce de bonne qualité de l’eau où faut que l’eau soit bien oxygénée. Si le lac change, sa qualité de l’eau baisse, l’eau se réchauffe, ça va changer pour d’autres espèces de moins bonne qualité de l’eau qui sont souvent moins intéressantes pour la pêche. Donc, ça peut aussi avoir des impacts au niveau récréatif. Ça fait un peu le tour de ce que je pense pour l’instant, mais y en a sûrement encore plein d’autres en plus.

Audrey Michel : Probablement qu’on pourrait élaborer encore beaucoup plus. J’en ai aucun doute. J’ai fait des liens, là, avec des choses qu’on a discutées. Premièrement, là, ça c’est pas un lien que j’ai fait nécessairement, mais la notion de laisser l’eau s’infiltrer, ça c’est nouveau pour moi. Fait que je suis vraiment heureuse d’avoir appris ça, puis de me questionner, de dire « Bon, est-ce que chez nous, je laisse l’eau s’infiltrer ou elle s’en va s’évacuer trop rapidement ? » Fait que, ça, c’est quelque chose que je vais porter attention dorénavant. Mais lorsque tu parlais de, justement, de la chaleur extrême que ça va avoir un impact sur les niveaux d’eau par exemple. Et là, moi, j’ai fait un lien avec quand on parlait du caractère collectif de l’eau, parce que justement, quand on a des périodes de chaleur extrême comme ça, on veut être en mesure d’aller se rafraîchir. Donc, si on est dans un système où est-ce qu’on veut aller privatiser notre eau, bien là, on coupe cet accès-là à la population, d’aller se rafraîchir dans l’eau. Fait que c’était juste un lien que j’avais fait comme ça, que je tenais à mentionner.

Chloé Lacasse : Ouais, c’est un bon lien.

Audrey Michel : Puis, je trouve ça intéressant aussi de parler de tout ce qui touche à l’eau potable parce que nous, c’est quelque chose qu’on tient un peu pour acquis j’ai l’impression. L’eau potable, c’est facilement accessible, mais, comme tu le mentionnes, il pourrait avoir des enjeux à niveau-là. Puis il y en a déjà, notamment pour les gens qui ont des puits. Donc, vraiment, je trouve ça très intéressant qu’on discute de tout ça. Et bien entendu, le but, c’est pas d’être alarmiste, c’est de conscientiser les gens pour, justement, peut-être qu’il y ait des prises de conscience comme moi aujourd’hui, de dire : « Bien, je savais pas l’importance que l’eau puisse s’infiltrer. » Donc, c’était pour ça que je tenais à ce qu’on discute de tout ça. Puis, on approche de la fin déjà. Ça a été quand même rapide. On a couvert beaucoup de terrain en peu de temps ! Mais je veux qu’on finisse sur, justement, quelque chose de positif parce que là, on a parlé de conséquences qu’on veut pas, on veut pas se rendre là. Puis, je trouve que c’est un beau projet qui mêle un peu, justement, l’implication citoyenne, mais chez les jeunes avec, justement, une visée d’améliorer la qualité de notre eau. Donc, vous avez mis un projet en place avec la Polyvalente La Samare à Plessisville. Est-ce que tu pourrais nous expliquer de quoi il s’agit ?

Chloé Lacasse : Bien oui, ça va me faire plaisir. C’est vraiment un super projet qu’on adore à l’interne, au GROBEC. Donc le projet s’appelle « Des rivières surveillées, s’adapter pour l’avenir ». En fait, c’est un projet qui a été conçu et développé par le Groupe d’éducation et d’écosurveillance de l’eau, donc le G3E, un organisme qui est situé à Québec puis qui développe des activités puis des projets en lien avec l’eau, en lien avec la qualité de l’eau, pour toute la province. Ils développent les activités, puis ensuite ils nous forment, les organismes de bassins versants, ou d’autres organismes, pour offrir ces activités-là dans les écoles, puis les mettre en place dans nos écoles. Donc, nous, c’est un projet qu’on a mis en place avec la Polyvalente La Samare, dans le Parc régional des Grandes-Coulées qui est situé près de la polyvalente. Donc, c’était super accessible pour nous. C’est la rivière Noire qui a été étudiée par les jeunes. Dans le fond, ce projet-là vise à faire un suivi de la qualité de l’eau de la rivière à long terme. Donc, c’est un projet que l’école, s’engage sur une entente, bon, la première entente, c’est sur 3 ans. Puis, ensuite, on renouvelle le plus possible. Nous, c’était notre première année. Puis ça vise, c’est ça, un suivi de la qualité de l’eau à long terme en se fiant sur les macroinvertébrés benthiques. Donc, les macroinvertébrés benthiques, c’est des invertébrés visibles à l’œil nu qui vont vivre dans le fond des cours d’eau. Donc vraiment dans le substrat qu’on retrouve dans le fond des cours d’eau. Et puis ça, c’est des bio-indicateurs. Qu’est-ce que ça veut dire des bio-indicateurs ? Ça veut dire que c’est des espèces, en fait, qui nous permettent vraiment de savoir quelle est la qualité de l’eau, parce qu’ils sont très sensibles aux changements, puis aux changements rapides. On va voir les impacts rapidement, en fait, avec les communautés de macroinvertébrés. Donc, si on a exemple des éphéméroptères qui sont une espèce, un ordre de macroinvertébrés, et bien ça veut dire que la qualité de l’eau est bonne parce qu’eux sont très très très sensibles à une mauvaise qualité de l’eau. Donc, dès qu’il y a une mauvaise qualité de l’eau, bien, on retrouverait ces espèces-là, par exemple. Puis il y a, bon, différentes espèces qui sont très tolérantes à une pollution. Donc, si on les retrouve, ça donne d’autres indices. Donc, bon, c’est un peu ça l’objectif. Puis là, en fait, on fait ces études-là avec les jeunes. Donc, on a commencé par faire 3 ateliers, environ, en classe à la polyvalente, qui vise, premièrement, à informer les jeunes. C’est quoi le projet ? Qu’est-ce que la rivière Noire ? C’est quoi sa qualité actuelle ? C’est quoi les informations qu’on a en ce moment ? Puis, qu’est-ce qu’on veut aller chercher ? Qu’est-ce qui est le fun avec ce projet-là, c’est que les données que les jeunes vont aller chercher, on va vraiment les utiliser par la suite. Donc, c’est vraiment des données qui sont manquantes. C’est pour ça qu’on a choisi la rivière Noire. C’est que ça faisait longtemps qu’on avait pas de données. Donc, c’est des données qui vont être utiles. Donc, là, on leur présente la rivière Noire. Ensuite, on leur parle des changements climatiques, les impacts que ça peut avoir. Puis, ensuite, on leur présente les données, les informations par rapport aux macroinvertébrés. Donc, il y a une période au complet qui est réservée à ça, pour leur apprendre comment identifier les macroinvertébrés, comment on va aller les récolter dans la rivière. Donc ça, c’est vraiment 3 périodes complètes, en classe, de théorie, mais quand même amusantes pour les jeunes, puisqu’ils savent qu’on va aller sur le terrain par la suite. Et donc, nous, on avait une demi-journée sur place, à la rivière Noire, de prévue. C’était le 9 mai dernier avec les jeunes dans le fond, à la polyvalente. Je l’ai pas mentionné, mais c’est les jeunes de secondaire 5 en option biologie. Donc, c’est une classe de 27 jeunes qui sont venus avec nous se mettre les pieds dans l’eau. Donc, ils enfilent les bottes-pantalons, qu’on appelle aussi les waders. Puis ils vont vraiment se mettre les 2 pieds dans l’eau, récolter les macroinvertébrés. Donc, il faut qu’ils frottent les roches dans le fond de l’eau pour que les macroinvertébrés soient emmenés dans le courant dans un filet. Donc, c’est très très concret. Ça leur permet vraiment de se sensibiliser, mais aussi d’être dans l’action. Tu sais, de le vivre vraiment, bon, ça ressemble à quoi travailler en environnement. Qu’est-ce qu’on peut faire et à quoi ça sert ? Puis aussi, c’est le fun de voir quand ils frottent les roches, tout ça, ils sortent le filet, puis là, ils voient tout ce qu’ils ont ramassé. C’est dire  : « Heille, je pensais pas qu’il y avait tout ça dans le fond de nos cours d’eau, à quel point il y a de la vie dans nos cours d’eau. » Puis, souvent, on pense seulement aux poissons, parce que c’est plus gros, on en mange, on en pêche. Bon. Mais de voir qu’il y a toute cette vie aussi, c’est marquant pour les jeunes. Mais on fait pas seulement l’analyse des macroinvertébrés. On va aussi faire des analyses physico-chimiques. Donc, voir bon, c’est pas la turbidité de l’eau, c’est quoi la concentration en oxygène dissous dans l’eau, et puis plein d’autres tests. Puis ça, c’est vraiment les jeunes qui vont réaliser les tests sur le terrain. Donc, il y avait comme plusieurs stations. Les jeunes se déplaçaient d’une station à l’autre ; récolter les macros ; puis faire la physico-chimie ; puis décrire les sites, les bandes riveraines ça ressemble à quoi. Donc, c’est vraiment… ça leur permet de voir plein de choses, toucher à plein de choses, puis d’être dans l’action. C’est ça. Puis, après cette période-là, qui est souvent le highlight, si je peux dire, le meilleur moment du projet pour eux — c’est vraiment un beau moment quand on revient en classe — on va identifier tous les macroinvertébrés qu’on a récoltés. Donc là, ils se pratiquent avec des clés d’identification à vraiment, avec les binoculaires, les identifier, puis à les dénombrer aussi, compter combien qu’on en a. Puis, ça nous permet d’avoir bon un indice de santé biologique du cours d’eau. À la suite de cette dernière période-là, on fait une période de conclusion qui permet de revenir avec les résultats. C’est quoi les résultats, puis leur montrer que leurs résultats sont en ligne sur une carte interactive qui est disponible sur le site du G3E. Donc, qui peut être utilisée par tout le monde. N’importe qui veut savoir « Ah, c’est quoi la qualité de l’eau de la rivière Noire ? », il va pouvoir aller sur le site, puis il va voir que c’est les élèves de secondaire 5, de l’option de biologie, de la Polyvalente La Samare, qui ont étudié le cours d’eau. Bien là on a les résultats. Dernièrement, je suis allée, le 30 mai, les présenter aux élèves, donc je peux dire les scoops. L’indice de qualité de santé biologique du cours d’eau était super bonne. Donc, c’était pas surprenant puisque la rivière Noire est dans un bassin qui majoritairement forestier. Puis, il y a des espèces quand même, justement, il y a de la truite, tout ça, des espèces de bonne qualité. Donc, c’est ça. On a pu voir ces résultats-là, c’est en ligne grâce aux jeunes. Puis, ça les conscientise vraiment à l’environnement. Même à la fin, on fait une période « Quelles actions on pourrait poser pour améliorer ? » ou « Qu’est-ce que vous pourriez faire pour sensibiliser d’autres personnes ? » Puis là, ça amène vraiment à des discussions. Puis, les jeunes en viennent à penser « Heille, je pensais pas qu’il y avait tout ça de vie dans mon cours d’eau, dans ce cours d’eau là, donc dans les cours d’eau en général. » Donc là, ils pensent au cours d’eau qu’il y a à côté de leur maison. « Il faudrait peut-être faire plus attention parce que, là, j’ai vu qu’il y avait tout ça. Puis là, comment je le regarde maintenant avec mes yeux d’élève qui a toutes ces notions-là ? Bien, je remarque qu’il y a pas de très bonnes bandes riveraines. Ah, l’eau est un peu chaude ou l’eau est trouble. » Puis là, ils peuvent vraiment remarquer ces détails-là qui, peut-être, avant on remarquait pas avant de faire ces activités-là. Puis, il y en a même que ça leur a donné envie de… ça peut donner une idée de carrière aussi dans un sens, de voir que t’aimes ça puis que tu peux être à l’extérieur pour travailler. Puis, en tout cas, donc, ça amène beaucoup de choses. Je trouve ce projet-là, c’était super positif pour les jeunes, autant pour les profs que pour nous aussi. Tout le monde adore ce projet-là. C’est un petit bonbon.

Audrey Michel : Ça se sent en tout cas dans ta voix que c’est un projet chouchou, que c’est vraiment… ça a l’air vraiment stimulant. Puis, juste à t’écouter, j’étais comme « Bien coudonc, j’aurais le goût d’être un étudiant de secondaire 5, puis d’aller faire cette activité-là moi aussi ! » Je te remercie beaucoup. Puis, ce que je vais faire là, je mettrai le lien vers le site web du G3E. Donc, si jamais il y a des auditeurs et auditrices qui sont curieux, qui voudraient aller voir par eux-mêmes les résultats qui ont été récoltés par les jeunes, ils pourront le faire. Ils pourront aller consulter la carte interactive. Et je vais également, bien entendu, ajouter le site web vers GROBEC. Donc si les gens veulent prendre contact avec toi ou avec quelqu’un d’autre de l’équipe, ils pourront le faire, ils auront accès à vos coordonnées. Et, là, j’avais dit que c’était la dernière question, mais en fait, vous vous lancez un podcast là sur… qui porte sur GROBEC. Est-ce que tu sais nous glisser un mot rapide par rapport à ça ?

Chloé Lacasse : Oui ! C’est le fun que t’en parles justement. C’est un projet qui est très nouveau. On lance le podcast le 8 juin. Donc mercredi le 8 juin, ça a été notre premier épisode. En fait, l’objectif du podcast, le lancement, puis les premiers épisodes se font dans le cadre du mois de l’eau, qui est le mois de juin. Donc, le mois de juin… le mois de l’eau, en fait, c’est vraiment un mois qui vise à sensibiliser les gens sur la ressource collective qu’est l’eau justement, et tout ça. La thématique de cette année est sur les lacs. Donc, pour nos premiers épisodes, pour suivre avec le mois de l’eau, on a décidé d’interviewer les associations riveraines, puis de les mettre en valeur via les premiers épisodes du balado. Donc, on va interviewer des petites entrevues avec eux, parler de la qualité de l’eau du lac, mais aussi des projets qu’ils ont faits, qu’ils ont mis en œuvre dans les dernières années. Qu’est-ce qui s’en vient ? Donc ça va être les premiers épisodes. Puis, par la suite, on va garder notre balado en ligne. On va faire encore quelques épisodes de temps en temps pour parler des projets qu’on a, parler des résultats qu’on a de certains projets, mais aussi peut-être faire d’autres petites entrevues avec des partenaires et tout ça. Donc, c’est un beau projet qu’on lance, c’est tout nouveau pour nous aussi tout ça. Donc, on espère que ça a bien fonctionné, puis que les gens vont être à l’écoute.

Audrey Michel : J’ai bien hâte d’écouter ça moi-même ! Puis bon, l’épisode va être diffusé après le lancement de votre balado. Donc, ça aussi, je vais mettre le lien dans les notes de l’épisode. Donc, ça sera facilement retrouvable pour les gens qui sont en train de nous écouter. Donc, bien, je te remercie beaucoup, Chloé. Ça a vraiment été un échange agréable. J’ai appris des choses aujourd’hui et je trouve ça vraiment intéressant de, justement, sortir un peu de la lunette du développement social, puis d’aller toucher à d’autres domaines. Puis, voir comment, comment on peut interagir entre nous, si je peux dire comme ça. Donc, ça a été un échange qui était vraiment apprécié de ma part. Donc c’est ce qui conclut. Encore une fois merci beaucoup.

Chloé Lacasse : Merci à toi, c’était super.

[DÉBUT DU THÈME MUSICAL]

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Cette balado et les activités du Comité régional en développement social du Centre-du-Québec sont rendus possibles dans le cadre d’une entente de collaboration avec la contribution financière de la MRC d’Arthabaska, la MRC de Bécancour, la MRC de Drummond, la MRC de L’Érable, la MRC de Nicolet-Yamaska, Centraide Centre-du-Québec et le CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec.

Pour en apprendre plus au sujet du développement social, rendez-vous sur notre site web au crds.centre-du-quebec.qc.ca. Merci pour votre écoute.

[FIN DU THÈME MUSICAL]